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samedi 7 décembre 2019

Ça doit faire Maluku !


  TOUT ce qui peut exister au type Semeuse m'intéresse ou m'amuse,
SAUF les monnaies (mais c'est une collection à part) et les entiers postaux.
Pour ces derniers, c'est volontairement que je les laisse de côté : j'ai déjà avec les timbres de quoi occuper toute une vie...
Cela dit, rien ne m'empêche d'en caser quelques uns dans ma collection lorsque, par exemple, la destination me manque ou me plait particulièrement.

  Vous savez déjà que les courriers pour l'étranger avec "Retour à l'envoyeur" sont une de mes recherches préférées, d'autant plus si la destination est lointaine ou exotique.

Voilà pourquoi, lorsque je l'ai vu passer, je n'ai pu m'empêcher d'acheter cet entier du 10 c. rouge :


   Le texte nous apprend que l'expéditeur parisien était un membre de la Société Entomologique de France, à la recherche de correspondants susceptibles de lui fournir des coléoptères (même les infiniment petits), lépidoptères et hyménoptères !

Pour ceux qui l'ignoreraient encore, ne confondons pas tout :

Les coléoptères sont un ordre d'insectes holométaboles dotés d'élytres protégeant leurs ailes. Du grec κολεός « fourreau » et πτερόν « aile ». Les scarabées, les coccinelles, les hannetons, les charançons par exemple.
Les lépidoptères sont un ordre d'insectes holométaboles dont la forme adulte est communément appelée papillon, dont la larve est appelée chenille, et la nymphe chrysalide.
Les hyménoptères sont un ordre d'insectes holométaboles, de la sous-classe des ptérygotes, de la section des néoptères et du super-ordre des endoptérygotes. Les abeilles, les guêpes, les fourmis et les frelons.

Cela vous donne une idée de sa collection à lui !...

(avec sa signature !)

  Merci Wikipedia ! Eugène Le Moult, né en 1882, était le fils du directeur des Travaux publics du Pénitencier de Cayenne. Seul exportateur des papillons de Guyane, il fait de ce commerce le troisième de la contrée, après l’or et les bois précieux. Rentré à Paris en 1908, il possède trois ans plus tard la quatrième collection de papillons du monde après celles des musées de Paris, Washington et de Londres !
Il vit de la vente de spécimens aux collectionneurs, et met le papillon à la mode en créant une véritable industrie d’objets décorés d’ailes découpées et collées. Il en vient bientôt à peindre des tableaux faits d'une palette de papillons. Pour augmenter ses collections, il a recruté des chasseurs parmi les bagnards. En 35 ans, il a collecté 4 500 000 papillons et insectes.

Belles bêtes !

Il meurt à Paris en 1967 dans son cabinet entomologique. 
Ses collections furent vendues aux enchères à Drouot.

  Ce 21 mai 1909, il sort de son appartement voisin du Jardin des plantes pour aller poster son courrier au bureau tout proche de la rue Monge. Il fait beau. Il a 27 ans.

Il a décidé d'écrire au Révérend Père Le Coq d'Armandvilla qui séjourne à l'autre bout de la planète, à Céram, pour lui demander de l'aider à compléter ses collections. 

Certainement avait-il lu la veille dans une des revues spécialisées auquel il est abonné, qu'une multitude de passionnantes mais affreuses bestioles volantes ou grimpantes, profitait du climat agréable des Moluques. 
Et il en voulait absolument quelques spécimens !


Cliquez sur la carte pour mieux vous situer :


Ahh ! Tous ces noms en rouge qui font rêver, à 13 000 Km de chez nous !...

  Cet archipel indonésien, alors possession hollandaise en Malaisie, était surtout connu pour ses îles productrices d’épices. 
Le nom des Moluques, en indonésien Maluku, vient de Jazirat al Muluk, « l'île des rois », et leur a été donné par les marchands arabes. Amboina en était la capitale. Céram une des îles de l'archipel, et Amahei un petit village de sa cote sud.

Ils n'ont pas dû en voir passer souvent des Semeuses
dans ce coin du monde !

  Pour la modeste somme de 10 centimes, cet entier postal va donc s'élancer le 22 mai 1909 vers l'Indonésie, afin de transmettre le message de notre entomologiste.

Sauf que...


...Vraiment pas de chance ! 
Pas moyen de trouver ledit Révérend Père à Céram !

  La carte est bien arrivée à Amboina, le 4 juillet 1909. Et même passée par Amahei. 
Un premier employé des postes de là-bas, avec son crayon bleu, a tout d'abord noté "pas connu" en Français et en Hollandais. 

Puis, comme le dit si bien l'étiquette bilingue rose, et le précise la mention manuscrite "Parti pour Paris", il semble que le destinataire ait choisi de rejoindre la France sans prévenir Eugène le Moult !

Deux autres cachets de la capitale des Moluques du 31 juillet et du 8 septembre témoignent de la remarquable rigueur professionnelle de la poste (hollandaise, je pense) qui a dû consciencieusement fouiller toute la région pour tenter de retrouver le Révérend Père Le Coq, sûrement bien connu ! 

  En désespoir de cause, il a bien fallu se rendre à l'évidence, et la carte a été retournée elle aussi à Paris, ornée de la fameuse griffe RETOUR A L'ENVOYEUR qui pour moi et ma collection, vaut mieux que tous les scarabées ou papillons du monde !


Ayez une petite pensée pour Eugène qui, lui, a dû être bien déçu !



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