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samedi 18 janvier 2025

La preuve !

 

   Même si cela revient un peu à enfoncer une porte ouverte, j'aime bien avoir sous les yeux la preuve de ce que tout le monde considère comme acquis.

Dans mon métier c'est même conseillé : avoir constaté les effets d'un médicament sur un patient porteur de telle maladie, c'est tout de même mieux que d'en avoir seulement lu la notice !

   Les techniques d'impression des timbres au début du XXème siècle me passionnent toujours autant, même si quelques subtilités m'échappent encore, et je me suis replongé récemment dans la lecture de l'introduction de l'excellent ouvrage de Louis Barrier consacré aux Semeuses. Je vous le conseille car on y apprend bien des choses.

Pour faire bref, les feuilles étaient imprimées, puis gommées, puis coupées en deux, et finalement perforées. On sait à peu près comment se déroulait l'impression. On a des images de l'extraordinaire machine à gommer. Et on sait que la machine à perforer le faisait ligne par ligne, du haut vers le bas de la feuille. 

Arthur Maury dans son Histoire des timbres-poste français, nous avait appris que cette dernière étape se faisait en perforant plusieurs feuilles à la fois : cinq exactement.


La flèche rouge vous montre le mouvement vertical du peigne qui perforait les (demi) feuilles de 150 timbres, et ce rangée par rangée : 18 coups de peigne sont nécessaires, alors que les feuilles se déplacent sous le peigne d'une rangée à chaque coup.


Ces (demi) feuilles de 150 timbres étaient piquées manuellement sur la machine en question en se servant des points et de la croix de repère visibles dans les marges, pour que la perforation soit correcte : on imagine bien que cela demandait une certaine précision de la part de l'ouvrier responsable, ainsi que toute son attention.

Le fait que 5 feuilles soient ainsi empilées (à la main et assez vite) avant d'être perforées explique la possible survenue d'accidents parfois spectaculaires : par exemple lorsqu'une des feuilles se repliait malencontreusement avant d'être recouverte par une autre, et que l'ouvrier ne s'en apercevait pas. Ou bien lorsqu'une des feuilles n'était pas aussi bien positionnée que les autres.

Les piles de 5, une fois perforées, étaient alors elles-mêmes empilées avant de passer au contrôle.


   Voici quelques exemples des conséquences de cette technique et de ses accidents :

C'est bien entendu souvent un coin de la feuille qui se repliait :




Parfois, un simple décalage horizontal lors du positionnement :




Mais parfois, c'est la machine elle-même qui dysfonctionnait alors que l'ouvrier avait correctement fait son boulot. Il pouvait arriver que la première rangée ne soit pas perforée et ses timbres non dentelés sur 3 côtés, alors que les autres l'étaient parfaitement :



Et, à l'inverse, c'est parfois la dernière rangée qui ne l'était pas, laissant une marge inférieure totalement dépourvue de perforation, et des timbres perforés sur 3 côtés seulement :



  C'est précisément ce dernier cas qui m'a inspiré ce petit article, car j'ai retrouvé par hasard en faisant du rangement dans mes archives les images de ces 2 fragments :


Ils datent du 21 octobre 1910, jour où la Semeuse à 5 c. vert était imprimée sur la presse 25, et sont issus de deux (demi) feuilles passées ensemble dans la machine à perforer (dans une liasse de 5 donc), alors qu'un dysfonctionnement est survenu et que la dernière rangée n'a pas été perforée convenablement.

C'est donc bien la preuve que plusieurs feuilles passaient ensemble sous la perforation.

Il ne nous reste plus qu'à trouver les 3 autres bas de feuille issus de la même liasse.

Ils doivent bien exister quelque part car je ne doute pas que les collectionneurs les ont précieusement conservés, et qu'ils auront l'amabilité de nous les montrer !


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