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jeudi 19 juillet 2018

Les chevrons vraiment sauvages


 Au sortir de le première guerre mondiale, l'usine Citroën qui fabriquait des obus, a vite su se reconvertir dans les automobiles, et les 2 publicités qui suivent montrent bien l'extraordinaire évolution de la marque (comme de notre société) entre 1919 et 1985 :


  Même s'il est vrai que ces dernières décennies, depuis la mythique DS, aucun modèle révolutionnaire n'a vu le jour, les plus anciens se souviennent du génial créateur André Citroën et de ses innovations ayant pour but de consolider l'image de sa marque, tout en assurant sa publicité dans le monde entier.

  Les plus célèbres sont sans aucun doute les fameuses croisières, véritables expéditions :
-la croisière noire de 1924 à travers l'Afrique, jusqu'à Madagascar
-la croisière jaune de 1931 à travers l'Asie, jusqu'à Saïgon
-la croisière blanche de 1934, à travers l'Amérique au Canada
Toutes sont restées dans les mémoires. La presse et même le cinéma ont largement diffusé à l'époque les fabuleux récits de ces aventures dont le caractère exotique et aventureux assurait le succès.

Internet nous permet aujourd'hui d'accéder en quelques clics à des documents, des images, et des films retraçant ces expéditions épatantes. Je vous laisse donc "surfer" à vôtre guise, et je remercie les sites sur lesquels j'ai puisé quelques renseignements et documents.

  Ce qui est moins connu, c'est que notre Semeuse, en véritable baroudeuse, s'était lancée quelques trimestres auparavant dans l'aventure africaine : la première traversée du Sahara en automobile, de Touggourt en Algérie, là où le train s'arrêtait au bord du désert, jusqu'à Tombouctou au Mali au bord du Niger.

Il s'agit du tout premier Raid Citroën fin 1922 - début 1923 :



  Prenez donc quelques minutes pour visualiser ces films extraordinaires, et vous aurez une idée de l'ampleur, de l'ambition de cette expédition, ainsi que des difficultés surmontées !

Avec images et son d'époque ! :
https://www.youtube.com/watch?v=0m1DXMhquZ8

Avec un commentaire moderne :
https://www.youtube.com/watch?v=EYWRlmhpi6g

Ou bien sans le son :
https://www.youtube.com/watch?v=7HDgRd0ARQE



Deux explorateurs ont laissé leur nom dans l'histoire : 
George Marie Haardt et Louis Audouin Dubreuil
mais ils n'étaient pas seuls !

  La mise au point des 5 automobiles (autochenilles Kegresse B2) choisies pour effectuer cette traversée périlleuse de 3200 Km (et même le double puisque voyage aller / retour) a dû mobiliser toute l'entreprise pendant de longs mois.


Pas question de rencontrer un échec ! Absolument tout devait être entrepris pour assurer le succès, prouver et vanter au mieux les qualités des véhicules de la marque, et des chenilles.


Des modèles réduits à l'échelle 1/10ème ont même été fabriqués pour faire également rêver les riches enfants de l'époque :

Cet exemplaire de 1923 vendu récemment, bien conservé,est devenu
particulièrement rare de nos jours, et estimé 15-20000 euros !


  La mission et les autos, passant par Marseille fin novembre - début décembre, emportaient donc du courrier, vous l'aviez compris, et cette première liaison postale transsaharienne a bénéficié d'un cachet spécial :
POSTE TRANSSAHARIENNE AUTOMOBILE
Il a été apposé à l'encre bleue, sur un nombre de plis qui reste inconnu (de moi en tout cas) en date du 17 décembre 1922, jour du départ de Touggourt.

Tous sont arrivés à Tombouctou le 7 janvier 1923, et sur l'un des films ci-dessus, on voit même le chef de l'expédition remettre solennellement ce premier courrier aux autorités :

Étonnant, non ?

Si on pouvait zoomer, on y verrait notre Semeuse !
Une bleue à 25 centimes : ma préférée !
Je n'ai jamais vu utilisé un autre timbre que celui-ci sur ces courriers.

  On ne peut pas dire qu'ils sont rarissimes car beaucoup ont été précieusement conservés, mais on n'en trouve pas tous les jours non plus... Même si je vous en montre plusieurs ici.
Un agent postal était souvent l'expéditeur et/ou le destinataire. Ou un député !


  Curieusement, les philatélistes d'aujourd'hui remarquent (surtout moi !) que ces timbres sont toujours issus des carnets en vente à l'époque : il faut croire que cette présentation avait été jugée très pratique pour les emmener en voyage !

On rencontre des 140 au type I B (carnets émis en 1921) :


Mais aussi au type II (carnets émis en 1922) :





Certaines lettres ont ensuite poursuivi leur périple vers Kayes 1600 Km plus loin, avec arrivée le 10 février, mais pas la mission, déjà repartie en sens inverse :





Ou vers Bamakou 1000 Km plus loin que Tombouctou :


Peut-être bien qu'un philatéliste faisait partie de l'équipe, constituée uniquement d'hommes de grande qualité ? En tout cas, la poste avait pris la chose au sérieux !


  Ce document nous apprend qu'André Citroën (posant devant la carte) et son directeur général des usines G.M. Haardt ont fait réaliser durant toute l'année 1922 des essais en métropole puis en Algérie, cumulant 20000 Km "sur les terrains les plus difficiles" : on ne rigolait pas avec la fiabilité !

Une chienne leur a même servi de mascotte.


Le journal l'Echo d'Alger nous permet de suivre presque jour par jour cette épopée :


  La lettre qui suit est assez mystérieuse : bien qu'elle porte une mention qui aurait dû lui valoir de faire partie du voyage, son cachet d'arrivée au Cameroun le 8 janvier n'est en aucun cas compatible avec notre raid : bizarre, vous avez dit bizarre ?

Aurait-elle pris l'avion pour aller aussi vite ? Non : plutôt le bateau ?
(à ma connaissance, il n'y avait pas de ligne aérienne à cette époque)

***********

  On trouve, rarement, de jolies cartes, pour le trajet retour de Tombouctou à Touggourt, 
du 29 janvier au 7 mars 1923, qui portent le même cachet mais en noir 
Poste Transsaharienne Automobile, daté du 31 janvier. 
Le cachet faisait donc partie du voyage. Mais pas l'encre bleue !
Elles sont évidemment affranchies avec des timbres locaux :


A votre avis, est-ce que ces cartes signées par Audouin Dubreuil lui-même
et fabriquées à dessein, ne se trouvaient pas justement
à l'intérieur des enveloppes ayant participé au voyager aller ?
Pourquoi pas ? Qui sait ?
Moi, l'idée me plait bien.

************

   Toujours est-il que la remise en vente ces jours-ci d'une lettre ayant suivi le même parcours, mais sans avoir reçu le cachet bleu "officiel" m'a interpellé.

Je l'avais déjà vue, mais pas achetée. Son prix ayant baissé, j'ai finalement craqué !

  Elle a été postée le 11 décembre à Nice, par ce Monsieur Raymond Séguy lui-même, adressée en poste restante. Ceci afin d'être sûr qu'elle lui soit retournée ensuite, puisqu'il aurait été bien incapable d'aller la retirer là-bas, une fois parvenue si loin de la promenade des anglais !
D'où la mention "non réclamé".

Elle est bien arrivée à Tombouctou, comme en témoigne le cachet du 8 janvier 1923, puis repartie comme le reste de la mission vers Touggourt pour revenir à Nice après plus de 3 mois de voyage :


Ce qui fait pour ma collection un joli RETOUR A L'ENVOYEUR de plus, et un bon argument pour moi pour vous raconter cette belle histoire !

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En revanche, si jamais vous croisez cette lettre ayant suivi la croisière noire
et vue il y a longtemps dans une revue philatélique, faites-moi signe SVP !...
Pas de cachet spécial cette fois-ci.


J'adooooooooooooooooore !


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