Même si cette pauvre bête tendrait à prouver le contraire, je pense qu'en philatélie l'expression reste absolument valable. Et si un jour vous trouvez une pièce tout à fait insolite, jamais vue, spectaculaire, étonnante, et qu'on vous la propose pour une bouchée de pain, méfiez-vous ! Il y a de fortes chances que l'on tente de vous escroquer, ou que vous vous soyez trompé. Circonstance favorisante si vous êtes persuadé d'être plus malin que les autres.
Je me souviens que mon père avait cru faire un jour une excellente affaire auprès d'un marchand d'art qui lui proposait des antiquités orientales magnifiques, avec des bijoux en or massif notamment, des pièces de musée qui inspiraient la confiance et émerveillaient l'enfant que j'étais. Plus modestement, le paternel gogo se laissa tenter par quelques poteries grecques très décoratives, en parfait état et d'un prix fort attractif, que le vendeur (qui s'est avéré être un escroc) a fini par lui céder au terme d'âpres négociations...
Ce n'est que quelques mois plus tard que la supercherie a été découverte : tout était bidon et de fabrication moderne ! Sauf peut-être l'or qui nous avait éblouis, et que le vendeur avait bien entendu remporté. Plainte fut déposée, les poteries saisies, de gros fragments prélevés pour analyse, puis elles nous furent finalement rendues.
Et elles décorent toujours 50 ans plus tard les étagères familiales en mémoire de ce "mouton à 5 pattes" que mon père avait cru dénicher, avec bien en évidence les gros trous laissés par les spécialistes qui les ont expertisées. Pour ne pas oublier ! L'escroc ne sera jamais poursuivi et a certainement continué ses malfaisances.
La génétique étant ce qu'elle est, j'avoue m'être fait avoir moi aussi à quelques reprises en achetant des timbres, mais cette expression est toujours restée dans ma tête et je me méfie beaucoup. Certains qui croient tout savoir devraient se montrer plus prudents...
Voici un exemple retrouvé dans une vieille revue par ailleurs excellente, que je ne citerai pas :
Et c'est justement ce téton effacé à la demande du ministre
Du coup, il est absolument logique que cette épreuve soit datée du 10 avril 1906. Ce n'est pas du tout une trouvaille exceptionnelle.
Et d'ailleurs, comment l'auteur a t'il pu croire que la poste aurait apposé son cachet sur une épreuve restée sans aucune suite plus de 3 mois ?
Il a tout simplement été ébloui par ce cachet à date, ce qui l'a empêché de reconnaître le bon timbre (qui est d'ailleurs resté non émis, assez méconnu). Il a cru y voir une Semeuse maigre et c'est à sa décharge que l'on doit bien admettre que la ressemblance est grande. Il s'est réjoui de pouvoir ainsi contredire tous ceux qui affirmaient depuis des décennies que cette maigre datait de juillet. Il négligeait tout le tirage de la Semeuse avec sol qui a précédé. Et il se trompait. Evidemment !
Voici une image pour ne pas vous tromper :
Ladite Semeuse maigre, sans son téton, a eu droit à ses épreuves elle aussi, mais certainement quelques semaines plus tard que celle avec téton :
(sur beau papier ou sur papier pelure)
Un galvano de 50 fut normalement fabriqué, dont voici une épreuve :
Elle plut suffisamment au ministre pour être émise en juillet 1906 :
Mais pas assez puisqu'elle fut assez vite remplacée en 1907.
Elle sera d'ailleurs très très peu utilisée en 1906 puisqu'il fallait auparavant écouler les importants stocks de la Semeuse lignée et de la Semeuse avec sol.
*****
J'en profite pour rectifier une erreur, souvent répétée, et qui a son importance dans l'histoire de notre Semeuse. Elle concerne précisément cette période de transition entre Semeuse lignée et Semeuse maigre.
On connait (et vous avez certainement déjà vu) de multiples essais ou épreuves collectives de diverses couleurs montrant différentes compositions du fond du timbre plus ou moins ligné, et qui avaient été datées de cette année 1906 par de nombreux auteurs (dont les admirables et regrettés J. Storch et R. Françon), ce qui paraissait somme toute très logique.
En voici quelques exemples :
(les deux auteurs cités avaient d'ailleurs rectifié le tir et reconnu leur erreur dans la presse philatélique, peu de temps après la sortie de leur remarquable ouvrage)
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