Non ! Ce n'est pas ce que je me suis écrié en ouvrant ma boîte aux lettres suite au passage du facteur, et heureusement pour moi !
Pour tout vous dire, ça fait plus de 5 ans que je prie justement pour ne plus jamais recevoir ce type de courrier, en provenance du ministère de l'intérieur. Et que je fais tout pour, ou presque...
-Depuis le jour funeste où j'ai eu la lumineuse idée d'accélérer quelques secondes en ligne droite sur l'autoroute, sans avoir pris la précaution de m'assurer au préalable de l'absence de radar !
-Depuis que deux sympathiques motards m'ont rattrapé, et qu'ils se sont sentis obligés de me confisquer immédiatement mon permis de conduire, sous prétexte que j'avais fait une brève pointe à 208 !
-Depuis qu'une jolie juge insensible à mon charme comme à mes arguments m'a soulagé de 6 points + 600 euros d'un coup, et que j'ai dû me déplacer durant 6 mois à vélo.
-Depuis que j'espère tenir 3 ans d'affilée sans la moindre infraction pour récupérer mes 12 points.
Mais ce n'est pas tout ! J'ai déjà failli tenir 3 ans.
J'étais of course devenu sage comme une image sur les autoroutes mais, alors que je revenais d'une virée à Saint Tropez, quittant La Môle en direction du col de Gratteloup (ça ne s'invente pas), j'eus la surprise de voir débouler de derrière un buisson, au milieu de la chaussée, non pas un sanglier mais un troupeau de gendarmes à jumelles ! Avec leurs grands gestes, ils m'ont vite fait comprendre que j'allais perdre 3 points de plus, et repartir pour 3 ans de pénitence de plus...
Résultat : même sur la route ou en ville, je suis me suis transformé en modèle de bonne conduite, avec les 3 points qu'il me reste !
Tout ça pour vous expliquer que je suis depuis, devenu un peu allergique aux P.V. !
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Mais cela ne m'empêche pas d'y prendre toujours le plus grand goût
lorsque l'on parle de philatélie...
Témoin cette carte postale, assez banale il est vrai, affranchie avec une Semeuse plus que moche, postée à Angers le 17.09.1920, adressée à Paris par une épouse à son mari , et qui s'est, du coup, retrouvée taxée à 50 centimes :
Pourquoi taxée ? Parce qu'elle est trop vilaine ?
Non, tout de même pas !
Serait-ce parce que le timbre est tout abîmé et perforé ?
Non plus !
Il est cependant exact que les particuliers n'avaient pas "le droit" de se servir pour leur usage personnel des timbres perforés par leur entreprise.
Mais pourquoi alors ?
Il est probable que l'attention des postiers a été attirée par cette perforation qui n'a pas sa place sur cette CP, mais ils ne pouvaient en aucun cas la taxer pour ce motif.
Pour la bonne raison que la poste n'était en rien perdante dans ces cas-là : c'est l'entreprise qui avait payé le timbre qui y perdait !
En fait, ils se sont surtout aperçu que le timbre avait peut-être déjà été utilisé, et donc oblitéré, avant d'être recollé sur notre carte, ce qui expliquerait son piteux état !
Là, il y a bel et bien tentative de fraude !
Et ceci est formellement interdit, tout à fait illégal, absolument hors la loi !
Un peu comme mes excès de vitesse...
D'où le Procès Verbal du 20.09.1920 qui va avec, dressé par le receveur du bureau Paris 110 de la rue de Rennes, voyant arriver la carte de Madame Daudin, postée lors de son voyage à Angers.
C'est son mari le destinataire, qui a été interrogé et qui s'est vu contraint de la dénoncer !
Ce Procès Verbal a été adressé au Procureur de la République d'Angers le 24 septembre, comme en témoigne la circulaire N°466 de la Direction des postes du Maine et Loire qui l'accompagne :
Cela a ensuite conduit à l'interpellation de Madame Daudin ! Elle a été interrogée dès son retour à Paris le 7 octobre, par le commissaire Edouard Murat, qui visiblement ne plaisantait pas avec ça :
On y apprend :
-le nom de jeune fille de Jeanne Alphonsine,
-l'identité de ses parents,
-qu'elle est française, née à Paris le 3 mars 1886,
-mariée à Ernest le 29 août 1903 avec qui elle a 4 enfants de 13, 11, 8 et 2 ans,
-qu'elle est concierge 34 rue du Dragon (l'adresse de la carte),
-qu'elle n'a pas d'antécédent judiciaire,
-qu'elle sait lire et écrire,
-que son mari mutilé de guerre est employé dans une compagnie d'assurance,
-et qu'ils subviennent à leurs besoins par leur travail !
Au dos de ce document, Jeanne reconnait évidemment avoir adressé cette carte à son époux, mais se défend d'avoir voulu frauder. Pas folle la guêpe ! Et peut-être bien honnête...
Elle prétend que ce timbre lui vient d'un commerçant qui le lui a donné comme appoint de monnaie (comme c'était monnaie courante à cette époque, si je peux oser ce jeu de mots).
Elle l'a conservé dans son porte-monnaie où il s'est retrouvé collé avec d'autres timbres. Elle a donc dû le décoller à la vapeur d'eau, ce qui explique son état.
Jamais il n'avait été oblitéré, elle le certifie, et d'après elle "une simple épreuve établira qu'il n'y a pas d'encre grasse dessus".
Moi je la crois.
Et j'espère bien que le Procureur, après avoir reçu ce compte-rendu, a abandonné toutes les poursuites envisagées contre elle.
Du coup, difficile de savoir si ce timbre a oui ou non été réutilisé, comme cela a été inscrit en rouge sur la carte, peut-être un peu prématurément :
D'ailleurs, au dos de la circulaire 466, un postier plus prudent que les autres avait noté ceci :
Il n'a pas voulu trop se mouiller, lui, et il a bien fait !
En revanche, l'histoire ne dit pas si ce sont des larmes qui ont coulé sur l'encre de la carte : pourquoi pas celles de Jeanne, apeurée et secouée par son interrogatoire policier ?
Globalement, on peut dire que les postiers de 1920 étaient aussi consciencieux, efficaces, perspicaces, pointilleux, et procéduriers que les tristes gendarmes obligés de se planquer de nos jours au bord des routes et autoroutes.
Mais allez savoir pourquoi, je les respecte profondément ces postiers.
Je les remercie d'avoir si bien fait leur boulot.
Alors que les autres...
Il est cependant exact que les particuliers n'avaient pas "le droit" de se servir pour leur usage personnel des timbres perforés par leur entreprise.
Mais pourquoi alors ?
Il est probable que l'attention des postiers a été attirée par cette perforation qui n'a pas sa place sur cette CP, mais ils ne pouvaient en aucun cas la taxer pour ce motif.
Pour la bonne raison que la poste n'était en rien perdante dans ces cas-là : c'est l'entreprise qui avait payé le timbre qui y perdait !
En fait, ils se sont surtout aperçu que le timbre avait peut-être déjà été utilisé, et donc oblitéré, avant d'être recollé sur notre carte, ce qui expliquerait son piteux état !
Là, il y a bel et bien tentative de fraude !
Et ceci est formellement interdit, tout à fait illégal, absolument hors la loi !
Un peu comme mes excès de vitesse...
Comme quoi on pouvait être davantage puni en 1849
pour avoir réutilisé un timbre usagé,
que pour avoir dépassé le 200 à l'heure en 2013 !
Et pour peu que le timbre ait existé avant, on vous aurait coupé la tête !
D'où le Procès Verbal du 20.09.1920 qui va avec, dressé par le receveur du bureau Paris 110 de la rue de Rennes, voyant arriver la carte de Madame Daudin, postée lors de son voyage à Angers.
C'est son mari le destinataire, qui a été interrogé et qui s'est vu contraint de la dénoncer !
On y apprend :
-le nom de jeune fille de Jeanne Alphonsine,
-l'identité de ses parents,
-qu'elle est française, née à Paris le 3 mars 1886,
-mariée à Ernest le 29 août 1903 avec qui elle a 4 enfants de 13, 11, 8 et 2 ans,
-qu'elle est concierge 34 rue du Dragon (l'adresse de la carte),
-qu'elle n'a pas d'antécédent judiciaire,
-qu'elle sait lire et écrire,
-que son mari mutilé de guerre est employé dans une compagnie d'assurance,
-et qu'ils subviennent à leurs besoins par leur travail !
Or, la perforation C.P. du timbre correspond à la compagnie d'assurance parisienne
nommée "Le Patrimoine" : ce n'est certainement pas une coïncidence...
Le mari serait-il plus coupable que l'épouse ?
Au dos de ce document, Jeanne reconnait évidemment avoir adressé cette carte à son époux, mais se défend d'avoir voulu frauder. Pas folle la guêpe ! Et peut-être bien honnête...
Elle prétend que ce timbre lui vient d'un commerçant qui le lui a donné comme appoint de monnaie (comme c'était monnaie courante à cette époque, si je peux oser ce jeu de mots).
Elle l'a conservé dans son porte-monnaie où il s'est retrouvé collé avec d'autres timbres. Elle a donc dû le décoller à la vapeur d'eau, ce qui explique son état.
Jamais il n'avait été oblitéré, elle le certifie, et d'après elle "une simple épreuve établira qu'il n'y a pas d'encre grasse dessus".
Est-ce la vérité ? A vous de juger !
Belle défense en tout cas!Moi je la crois.
Et j'espère bien que le Procureur, après avoir reçu ce compte-rendu, a abandonné toutes les poursuites envisagées contre elle.
Du coup, difficile de savoir si ce timbre a oui ou non été réutilisé, comme cela a été inscrit en rouge sur la carte, peut-être un peu prématurément :
Il n'a pas voulu trop se mouiller, lui, et il a bien fait !
En revanche, l'histoire ne dit pas si ce sont des larmes qui ont coulé sur l'encre de la carte : pourquoi pas celles de Jeanne, apeurée et secouée par son interrogatoire policier ?
Globalement, on peut dire que les postiers de 1920 étaient aussi consciencieux, efficaces, perspicaces, pointilleux, et procéduriers que les tristes gendarmes obligés de se planquer de nos jours au bord des routes et autoroutes.
Mais allez savoir pourquoi, je les respecte profondément ces postiers.
Je les remercie d'avoir si bien fait leur boulot.
Alors que les autres...