J'adooooooooore lorsque notre Semeuse
n'a pas été imprimée correctement !
Je ne pense pourtant pas être une exception dans le milieu des philatélistes, mais beaucoup au contraire recherchent la perfection.
Un bon centrage, de belles dents bien régulières, une jolie couleur, des traits fins, une gomme brillante et vierge au dos, sont il est vrai des qualités suffisamment difficiles à réunir sur un même timbre pour en faire parfois une rareté. Mais pour la plupart des valeurs au type Semeuse on y arrive avec un peu de patience et d'argent.
Je n'irai pas jusqu'à vous dire que je les préfère lorsqu'elles sont vraiment moches mes Semeuses, mais presque ! C'est un peu comme si vous me demandiez si je préfère passer un moment avec une femme froide à la beauté parfaite, ou bien avec une super rigolote qui a un charme fou...
Moi, ça fait longtemps que j'ai choisi : j'aime bien quand il y a des défauts, des petits comme des gros, ce que les collectionneurs appellent des variétés.
J'en ai récemment trouvé une belle, et je me faisais un plaisir de vous la montrer pour fêter les 100000 pages vues de ce "blog". Avec un peu de retard dû aux vicissitudes de son voyage vers ma collection, vous allez pouvoir enfin comme moi l'admirer à la fin de cet article...
Alors j'ai cherché à vous la présenter de mon mieux, à la mettre en valeur aux cotés d'autres variétés d'impression spectaculaires.
Ici on dirait que la Semeuse porte un énorme sac blanc en bandoulière.
(impression à plat)
Et là, qu'elle se drape dans une serviette de bain.
(impression rotative)
Mais parfois, le morceau de papier qui s'est posé par mégarde sur la feuille au moment de l'impression est plus gros, et la variété touche alors plusieurs timbres. Certains sont même quasiment ou totalement non imprimés :
La feuille de 1906 dont ce bloc est issu a été imprimée à plat,
puis a été manipulée par les ouvriers de l'atelier pour être gommée,
puis perforée, par des machines différentes, ce qui explique
que le fragment responsable ait disparu.
Celle-ci rotative avec son coin daté, a été imprimée sur une bobine
de papier déjà gommé, et perforée dans la foulée par la même machine.
On voit que les carnets pouvaient également être touchés par la même
mésaventure, puisque leur mode de fabrication
était identique à celui des feuilles.
Et l'on commence à se demander comment ces défauts assez énormes ont pu échapper aux contrôles pourtant rigoureux qui étaient effectués avant de livrer les timbres aux bureaux de poste.
Peut-être qu'au moment du contrôle, le morceau de papier superposé était encore à sa place ?
Ou bien un moment d'inattention ? Qui sait ?
Il est à mon avis impensable que ce soit par souci d'économie que ces feuilles fautées n'ont pas été envoyées au rebut et qu'elles ont été finalement mises en vente, car c'est le consommateur qui était lésé en achetant des timbres dont il ne pourrait pas se servir pour l'affranchissement.
A moins qu'il ne fût philatéliste...
Il est aussi possible qu'au lieu d'être détruites, elles aient été mises de côté par un petit malin...
Tant mieux pour nous !
L'exemple qui suit est encore plus frappant :
C'est tout le coin supérieur gauche de cette feuille qui a été mal positionné
sous la presse, puisque replié presque exactement à 45°,
juste avant l'impression !
Et si on retourne le bloc, on peut voir que notre Semeuse
est imprimée au dos, et qu'elle se retrouve à l'horizontale !
Du coup, certains "timbres" échappent même à la dentelure...
Et, ce qui est plus étonnant encore, on voit que la feuille a été gommée
alors que son coin était toujours replié de l'autre côté !
En revanche, le coin a enfin été déplié pour passer la feuille
sous la machine à perforer. Comme quoi quelqu'un
a bien fini par s'apercevoir de quelque chose !
C'est ça qui me plait dans ces variétés : c'est qu'il faut pour les comprendre et les apprécier au mieux, bien connaître les procédés de fabrication des timbres de l'époque.
Le fragment qui suit me pose en ce sens encore un problème : j'ai du mal à imaginer ce qui a pu se passer ce 24 octobre 1927 :
L'impression est rotative, vous l'aviez compris. Le papier est froissé sur la gauche, avec des "plis accordéons". Il y a ensuite une superposition de deux papiers sur laquelle s'est faite l'impression, comme l'on peut en voir dans les "impressions sur raccord".
(en principe, et d'habitude, les raccords entre les bobines de papier
sont rectilignes et la plupart du temps horizontaux)
Mais sur le morceau qui apparaît en trop, les 4 fragments de Semeuses
sont imprimés (très mal) du côté gommé du papier !
Comme si on avait raccordé par erreur les deux bobines ensemble,
l'une avec le coté gommé en-dessous, et l'autre au-dessus...
Ce que j'ai vraiment du mal à concevoir.
Mystère donc !
Je pense que la mauvaise réalisation de ce raccord peut expliquer
que le papier se soit froissé, ce qui n'a pas empêché la machine rotative
d'effectuer correctement la perforation et la découpe finale de la feuille.
Un accident UNIQUE en tout cas !
Mais voici enfin celle que vous attendez tous, la nouvelle star qui a su si bien se faire attendre, et faire monter le suspense au-delà du supportable.
Celle qui sera bientôt désirée par tous ses futurs fans.
Probablement enfermée et jalousement conservée dans une vieille collection depuis des décennies.
Et ressortie pour notre plaisir à tous.
Elle date du 2 mars 1909.
C'est la (demi) feuille de droite d'une feuille de 300.
Imprimée sur la presse 25, par un certain opérateur dont l'initiale est un G.
Une merveille !
(ne vous gênez pas pour cliquer sur les images pour zoomer)
Remercions de tout cœur ce fameux G d'avoir laissé traîner malencontreusement une autre feuille à cet endroit au moment de la mise sous presse de celle-ci !
On l'embrasserait s'il était toujours des nôtres...
Il faut dire qu'elles ne devaient vraiment pas être faciles à manipuler ces grandes feuilles de papier prévues pour 300 timbres, à placer au millimètre dans la machine, et avec une cadence soutenue.
On lui pardonne volontiers son erreur !