Le matériel servant à l'impression de notre Semeuse a toujours été l'objet de beaucoup d'attentions de la part des ouvriers de l'atelier de fabrication des timbres-poste, mais la manipulation des feuilles pouvait, comme nous l'avons souvent vu, être à l'origine d'accidents entrainant des défauts, que les philatélistes apprécient en tant que variétés.
En ce sens, le passage à la typographie rotative, dès 1922, a apporté un net progrès : les problèmes de dentelure, ou de pliage du papier sont ainsi devenus bien moins fréquents. Pour vous en convaincre, cherchez donc par exemple une Semeuse non dentelée imprimée en rotatif, et vous m'en direz des nouvelles !... De plus, le rendement des machines rotatives Chambon était nettement meilleur, tout en diminuant les interventions manuelles.
Pour l'impression des feuilles-vente de 100 timbres, les cylindres étaient constitués de 4 galvanos de 50, chaque tour imprimant 2 feuilles, avec deux coins datés. Ceux qui comme moi les collectionnent le savent bien. J'aurais tant aimé vous montrer un de ces cylindres, mais on n'en connait aucune image, hélas ! Aucun n'ayant été conservé par l'administration.
Ces cylindres devaient pouvoir être démontés de leur machine, soit pour interrompre un tirage et passer à une autre valeur ou même à un autre timbre, soit pour des raisons techniques. Et c'est lors de ces manipulations qu'un accident pouvait venir les endommager, malgré toutes les précautions prises.
Si l'accident touchait la partie qui imprimait les timbres, les contrôleurs s'en apercevaient lors de la vérification des feuilles imprimées, celle-ci étant rigoureuse.
C'est vraisemblablement ce qui s'est passé au cours du tirage du 10 c. vert YT n°159. Les rotatives et le personnel commençaient à être bien rodés, après des débuts difficiles dont nous avons déjà parlé ici. Après les tout premiers tirages de ce timbre (décrit ensuite comme type I B), de nouveaux galvanos furent fabriqués et utilisés successivement pendant les années suivantes (donnant des timbres au type III).
Les philatélistes s'intéressant aux coins datés, suivant les travaux et les publications du Baron De Vinck, peuvent aisément identifier ces différents tirages.
Or, une retouche est bien connue pour ce timbre : on parle du S du mot POSTES, et sa position dans la feuille est connue : à la case 40, soit sur le dernier timbre de la quatrième rangée.
Les catalogues spécialisés la datent de 1927, et l'on a pu identifier le cylindre portant cette retouche : c'est celui dénommé R + S, connu pour avoir été utilisé entre le 5 octobre 1926 et le 2 avril 1927.
Une seule des deux feuilles imprimées par ce cylindre est concernée : il s'agit de S. Ceci n'a pu être affirmé qu'en examinant des feuilles entières ou des grands blocs comportant à la fois la case 40 et le coin daté. C'est la chance que nous avons eu en tombant sur cette jolie feuille :
Mais la retouche en question se voit également bien entendu sur les feuilles non préoblitérées, puisque c'était le même cylindre qui imprimait, et ce dès la fin de 1926.
19.11.26
23.12.26 préo
28.12.26
28.12.26 préo
18.01.27 préo
05.03.27
17.03.27
19.03.27
Et on doit logiquement la trouver présente jusqu'à la fin de l'utilisation de ce cylindre, le 2 avril.
Elle n'est pas présente en revanche sur les cylindres des tirages qui suivent.
En y regardant de plus prés, on constate que c'est tout l'angle inférieur droit du timbre qui a été retouché, et non pas seulement le S :
Peut-être que l'un de nos lecteurs pourra nous montrer l'existence d'autres dates, notamment entre le 5 octobre et le 19 novembre 1926, pour tenter de savoir à quand remonte exactement l'accident à l'origine de cette célèbre retouche ?