De nos jours, plus personne ne prend la peine d'inscrire cette mention sur son courrier tellement le transport aérien s'est généralisé pour relier deux régions lointaines, voire deux continents. Ni sa rapidité ni sa fiabilité ne sont plus à démontrer. Mais il n'en a pas toujours été ainsi.
Vous avez certainement en mémoire les aventures des grands pionniers de l'aviation qui ont laissé leurs noms dans l'Histoire, et dont les exploits ont fait rêver plusieurs générations. Nous en avons déjà relaté ici quelques épisodes, auxquels notre courageuse Semeuse avait pris part. Principalement dans la période entre les deux guerres, l'aviation ayant largement profité du conflit de 14-18 pour évoluer, se moderniser et devenir un moyen de transport bien plus fiable qu'à ses débuts.
Avant la première guerre en revanche, prendre son envol sur des machines particulièrement sommaires et fragiles, et réussir à atterrir ensuite sans trop de dégâts restait un exploit ! Les meetings aériens avaient un succès fou, et le public se bousculait pour admirer le spectacle de ces pilotes, pour partager leurs frissons, et s'émerveiller devant leur courage et leur agilité.
C'est en 1909 que Louis Blériot réussit la traversée de la Manche avec un vol de 37 minutes pour 35 Km, mais il faudra attendre 1927 pour que Charles Lindbergh traverse l'Atlantique, en 33 heures !
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Pour le transport du courrier sur de longues distances, la voie ferroviaire et la voie maritime étaient les seules à se partager le marché comme l'on dit, et depuis longtemps. Au prix d'une certaine lenteur bien entendu, mais tout le monde s'en satisfaisait puisqu'il n'y avait pas d'autre choix.
Jusqu'à ce que l'idée d'utiliser l'avion se mette à germer dans l'esprit de quelques administrations postales. Et la France était alors à la pointe de la modernité !
C'est en Inde en février 1911, à l'occasion d'une exposition internationale agricole, d'industrie et des transports, qu'un Français transporta pour la toute première fois du courrier sur une dizaine de kilomètres à bord de son biplan, avec l'aide de l'armée britannique.
En France, le premier vol postal "officiel" date de juillet 1912 autour de Nancy : trois sacs de dépêches sont transportés sur 27 Km.
On ne peut pas dire que le service rendu pour d'aussi courtes distances fut véritablement remarquable, mais l'idée était lancée, et notre Semeuse était déjà de la fête, accompagnée d'une vignette spécialement émise, vendue 25 centimes au profit de l'aviation militaire :
C'est finalement en octobre 1913 qu'eut lieu la première liaison postale aérienne, expérimentale certes, mais apportant réellement un service utile au transport du courrier.
Le courrier à destination des Antilles partait alors de Pauillac tout près de Bordeaux, sur la rive gauche de l'estuaire de la Gironde. Venant de Paris, il était normalement transporté jusqu'à Pauillac par le train du soir, juste à temps pour être embarqué le lendemain sur un paquebot de la Compagnie Générale Transatlantique assurant régulièrement la traversée, tous les quinze jours.
Ce qui fait que pour le courrier centralisé à Paris après le départ du train, ne pouvant donc être acheminé à temps pour la traversée, il en résultait un retard considérable ! Car il fallait alors attendre le paquebot suivant.
Retard que le Ministre responsable ne pouvait accepter, d'où son idée d'utiliser l'avion, seul moyen capable d'acheminer assez rapidement ce courrier le jour même, avant le départ du paquebot.
La presse en parle dès le 12 octobre (La Liberté) :
C'est donc au matin du 15 octobre avant 7 heures, en présence d'Alfred Massé, matinal Ministre du commerce, de l'industrie, des postes et télégraphes, et fier d'être à l'origine de cette expérience, que le courrier arrivera par une automobile postale à l'aérodrome de Villacoublay, situé au sud-ouest de la capitale.
L'avion choisi est un Morane-Saulnier G. "Les Françaises" emportera un sac d'une dizaine de kilos de courrier, et il sera piloté par le lieutenant de cavalerie Emmanuel Ronin.
Après quelques péripéties et environ 500 Km de vol, il atterrira à 14 h.15 à Saint Julien Beychevelle, près de Pauillac, puis les sacs postaux seront acheminés par une voiture des postes jusqu'au paquebot "PEROU" qui pourra aussitôt lever l'ancre, en tout début d'après-midi.
A son bord, notre Semeuse bien entendu.
Compte-tenu de leurs destinations toujours "exotiques", bien peu en sont revenues, mais quelques rares lettres ou cartes postales font encore aujourd'hui la joie d'heureux collectionneurs, dont je fais désormais partie.
Ici, une lettre postée à Paris le 14, à destination de Mana en Guyane, sur laquelle on notera l'absence de surtaxe, alors que celle-ci avait été envisagée. Cachets oblitérant de Paris 5 - avenue de la République - 18 h. 30, puis Paris R.P. Etranger au dos, après le départ du train du soir.
La revue "L'aérophile" du 1er novembre relatera merveilleusement cette aventure, avec d'émouvantes photographies :
MERCI à tous les correspondants qui ont eu l'amabilité de partager avec moi ces documents d'époque, et aux sites internet consacrés à cette épopée, dans lesquels j'ai également puisé des informations précieuses. Vous pouvez aussi cliquer sur ce lien :
Article paru à l'occasion du centenaire de ce vol
A noter que La Poste Française avait émis dès 1978 un joli timbre commémoratif :
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