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dimanche 1 novembre 2020

A la main ou à la machine ?

 

  En juin 2019, nous avions vu que l'administration prenait très au sérieux l'impression des timbres destinés à ses cours d'instruction, et de leurs surcharges.

Je crois bien avoir lu quelque part (mais où ?) que la surcharge ANNULÉ, comme bien d'autres, était apposée typographiquement à plat sur les feuilles de 150 timbres, mais était-ce effectué par panneau de 50, ce qui nécessiterait trois passages sous presse pour que l'ensemble de la feuille soit annulé, ou bien en une seule fois ?

Si l'un de nos lecteurs a la réponse, je veux bien la connaître, ainsi que ses sources. 

Toujours est-il que l’alignement et le centrage de ces surcharges sont le plus souvent très bons lorsque l'on examine des feuilles entières. D'où la rareté extrême du fameux Z que je vous avais montré !

Cela ne devait pourtant pas être si aisé que ça de manipuler ces grandes feuilles avec précaution, et de les positionner parfaitement sur la presse afin que la surcharge soit bien placée ! Vous allez voir que parfois pouvait survenir un accident...


  C'est une nouvelle fois en farfouillant sur internet que je suis tombé sur ce joli panneau mis en vente, imprimé en 1921 puis Annulé :

Toujours ce même 30 c. rouge !

Comme j'avais déjà dans ma collection un bloc de 100 représentant les deux tiers inférieurs d'une feuille de ce timbre, cela m'amusait de rencontrer un panneau haut de feuille qui pourrait éventuellement venir compléter mon bloc. 
Ce qui, esthétiquement, pourrait être du plus bel effet !

Donc, je clique sur l'image de ce lot pour en savoir davantage, d'autant plus que le prix était raisonnable, et que les enchères n'avaient pas l'air de vouloir s'envoler. Il y a assez peu d'amateurs de ces surchargés.

Et c'est là que mon palpitant s'est un peu affolé : 
Ce n'est pas possible ! m'écriais-je incrédule. Comment le vendeur a t'il pu ne pas s'en rendre compte ? 
Pourquoi n'en parle t'il pas dans sa description ? 
C'est trop beau pour y croire !

Mais pas de doute, il y a une affaire, un Chopin comme disent les philatélistes. Regardez donc mieux avec moi le coin supérieur gauche du panneau :

Il y a une bizarrerie !

Le premier timbre porte en effet une surcharge décalée vers le bas, et le second une double surcharge ! 

Ceux qui ont l’œil auront immédiatement compris ce qu'il s'est passé : le coin de cette grande feuille s'est malencontreusement replié lorsqu'elle a été mise sous presse pour la surcharge. 
On voit d'ailleurs très bien le pli qui a marqué le papier, en diagonale.
Du coup, le premier timbre s'est retrouvé dépourvu de toute surcharge, et sur le second celle-ci a été amputée de son début.

Vous comprendrez que c'est vers l'arrière que le coin s'est replié, sinon les autres timbres voisins auraient eux aussi été affectés par le défaut de surcharge.

Mais ce n'est pas tout !

L’ouvrier responsable s'en est bien évidemment aperçu. Il a voulu immédiatement corriger ce défaut, et nous allons voir qu'il a fait comme il a pu ! 
Il ne pouvait pas laisser un timbre et demi non ou mal surchargé. 
Non ! Pas question !
Alors, système D oblige, il s'est débrouillé pour apposer une surcharge remplaçante.

Si l'on zoome un peu plus (ne vous gênez pas pour cliquer sur l'image), on voit bien qu'il s'agit d'un modèle différent d'ANNULÉ  :

L'encrage des lettres est imparfait, et elles ne sont pas tout à fait du même modèle

Par ailleurs, si vous regardez sur le bord de feuille, on y voit la trace de la fin d'un autre ANNULÉ !

Cette surcharge-là a forcément été apposée manuellement, ce qui explique son moins bon encrage.

Elle ressemble d'ailleurs beaucoup (pour moi c'est la même en réalité) à celle qui était utilisée pour annuler les carnets destinés eux aussi aux cours d'instructions :

Fragment d'un carnet portant la même surcharge manuelle.
Les carnets étant déjà constitués, la surcharge ne pouvait pas être réalisée par la presse.


Or, on sait que cette surcharge des carnets était apposée manuellement, vraisemblablement à l'aide d'une "bande" imprimant cinq fois le mot "Annulé" d'un coup.
En effet, sur bien des carnets, l'alignement et le centrage sont différents sur les 4 rangées de 5 timbres.

Je vous ai indiqué en jaune les décalages en question


L'ouvrier, pour éviter de surcharger inutilement la marge de notre panneau rouge, a même dû s'en mettre plein les doigts, puisque l'on peut aussi y apercevoir les traces d'une empreinte digitale !

Comme pour nous convaincre que cette deuxième surcharge est bien manuelle !

Ce qui en fait un panneau exceptionnel et à mon avis unique !
Peut-être encore plus que le Z ?

Au fait, j'avais oublié de vous dire que j'ai bien entendu remporté les enchères, et que vu le prix, heureusement pour moi, personne d'autre n'avait remarqué tout ça !


N. B. Certains catalogues signalent l'existence d'une double surcharge, mais je ne l'ai jamais rencontrée



mardi 27 octobre 2020

On progresse, mais peu !

 

 Je m'interrogeais, en mars dernier, sur le pourquoi d'un petit point de couleur, volontairement imprimé sur le pont de certaines feuilles de certaines Semeuses, notamment en haut, au-dessus du millésime.

Nous avions vu que le 15 c. vert Semeuse lignée était concerné, en 1921.

  La mise en vente récente de plusieurs panneaux de ce timbre, surchargé MEMEL, me permet d'apporter une petite précision. D'autant plus que ces panneaux étaient issus de feuilles datées du même jour d'impression, et coupées en 3.


 Et bien : sachez que l'on retrouve ce fameux point aussi bien sur une (demi) feuille de gauche que sur celle de droite :

(demi) Feuille de gauche


(demi) Feuille de droite

Les bords les plus larges permettent de les identifier facilement. Sinon, la gomme au dos le permet aussi, puisqu'elle s'arrête loin du bord.

Voila ! C'est un petit plus, je vous l'accorde, mais un plus tout de même.


mardi 20 octobre 2020

Coin daté pas daté

 

  Même si je vous faisais part il y a quelques jours à peine de mon intérêt pour les dates, ne croyez pas que je cultive l'art du paradoxe, mais j'aime bien aussi lorsqu'il n'y en a pas !

  En ce qui concerne l'impression à plat, je n'ai jamais rencontré de feuille dont la marge inférieure soit privée de sa date d'impression. Parfois il faut la chercher à droite, et pas à gauche... L'absence du millésime de l'année se rencontre en revanche quelquefois, nous l'avions vu. 

Sur la presse, il fallait une mise à jour manuelle, quotidienne en début de journée, de la part de l'ouvrier responsable qui y faisait également figurer une initiale ou un chiffre permettant de l'identifier. Ces caractères étaient imprimés en-dessous des 2 feuilles de 150 timbres qui formaient la feuille initiale de 300. L'encrage se faisant en même temps que celui des timbres, donc toujours de la même couleur.

  Les machines rotatives disposaient de deux dateurs puisque chaque tour de cylindre donnait 2 feuilles de 100 timbres. Mais ces dateurs (comme les numéroteurs situés de l'autre coté de la feuille) étaient indépendants du cylindre imprimant les timbres, et imprimaient en noir, à de rares exceptions prés. 

On connait quelques erreurs de dates répertoriées : jours fériés ou dimanche, ainsi que des dates "farfelues" n'ayant rien à voir avec les jours du tirage en question. Ce qui s'explique là encore par la manipulation nécessaire chaque matin, avant de lancer la presse, qui représentait une source toujours possible d'erreur.


 Collectionnant les coins datés au type Semeuse dans leur ensemble, et depuis des décennies, je vous avais déjà montré le seul sans date que j'aie eu la chance de croiser :

Comme en témoignent les traces d'encre noire visibles, on peut penser ici que l'absence d'impression de la date résulte soit d'un mauvais encrage du dateur, soit d'un manque de pression sur le papier de sa part (mauvais réglage ou accident). Le mécanisme était pourtant d'une extrême fiabilité.

 

  Le coin de feuille que voici a été victime d'un tout autre type d'accident, et il est à mon avis unique :

Il s'agit du 10 c. vert (Yvert n°159) au type III, dont le tirage s'étend de 1923 à 1927, non pas en continu mais par périodes plus ou moins longues en fonction des besoins.


  La morphologie des parallélogrammes imprimés sous les timbres permet d'être plus précis, en identifiant le cylindre qui tournait ce jour-là :

J              H = 3 ¼,  3 ½,  3 ½. Uni. Griffes au bas.

K             H = 3 ½,  3 ¾,  4. Uni. Griffes au bas.

 

Premier jour

Dernier jour

Chiffres

Presse

Tirage

1ère partie

23.2.25

7.3.25

I

3

2ème partie

10.3.25

16.3.25

I

3

3ème partie

18.3.25

29.4.25

I

2


Il ressemble plus à K qu'à J.

 Toujours est-il qu'un petit bout de papier volant, malicieux, est venu s'interposer justement à cet endroit au mauvais moment, alors que la rotative était lancée à plein régime !

Il a ensuite été retiré, après que l'encre verte du coin du 100ème timbre, ainsi que l'encre noire de la date, aient été déposées dessus, et non sur notre extraordinaire coin daté pas daté.

Voici à quoi il aurait pu ressembler sans cet accident :

  Par analogie, il est amusant de comparer les coins datés de ce type III à ceux du type IB du même timbre, qui ont été les précurseurs de l'impression rotative en France, en 1922 : 

La date était alors imprimée en vert, et les parallélogrammes volontairement supprimés aux deux coins afin que la date y soit bien lisible. Vert sur vert ne pouvant rien donner de bon !

Il n'empêche que je les adore plus que tout ces dates vertes !

Si vous en trouvez, cliquez S.V.P. sur "Aucun commentaire" pour me joindre. MERCI

V

V

samedi 17 octobre 2020

J'aime bien les prématurés !

 

  Tout amateur de la Semeuse connait sa date de naissance philatélique : c'est le 2 avril 1903 que furent mis en vente les premiers timbres à son effigie. Il s'agit du 15 c. vert de la Semeuse lignée, dont la teinte a été choisie après de multiples essais.

Pour ne pas dénaturer l'oeuvre de son célèbre créateur Oscar Roty, le graveur Mouchon s'est donné bien du mal pour rendre au mieux l'effet de relief sur ce fond ligné, et cela a également donné lieu à de multiples essais. Nous y reviendrons à l'occasion...

  Il parait que le timbre devait initialement être tiré sur un papier teinté jaune vif, du plus bel effet, mais qui se serait avéré trop coûteux. On en connait quelques rares exemplaires.

  Tout ça pour dire que bien des tâtonnements furent nécessaires avant de livrer ce nouveau timbre à sa destinée, restée unique dans les annales de la Poste du fait de sa diversité et de sa durée d'utilisation extraordinaire !

  L'accueil du public fut enthousiaste, et les ventes se sont envolées. Au point que le premier jour de mise en vente, dans les quelques bureaux parisiens qui avaient été approvisionnés, il fallait faire la queue pour s'en procurer aux guichets. Du coup, on en trouve assez souvent sur des lettres (puisque 15 c. était le tarif de la lettre pour l'intérieur) oblitérées de ce célèbre jeudi. Les gens, philatélistes ou pas, les ayant précieusement conservées.



  Moi, vous le savez, je m'intéresse beaucoup aux dates. Celles situées au bas des feuilles ou des carnets imprimés à plat, aussi bien que les coins datés des feuilles rotatives. Je répertorie absolument TOUT ! C'est mon dada, comme disaient les anciens. Ça me plait, et ça m'apporte souvent des renseignements très utiles sur mes timbres préférés.

Vous comprendrez que lorsque j'ai su que j'avais raté la vente sur internet de ce joli panneau, je m'en sois mordu les doigts :

Il a été imprimé la veille de l'émission du timbre, le 1er avril, ce joli poisson ! 

Millésime 3 pour 1903, tirage sur la presse 1, conduite par un ouvrier identifié par la lettre Q.

 C'était il y a quelques années, et mes doigts ont tant bien que mal cicatrisés depuis, ce qui me permet de vous en parler aujourd'hui. Mais il me manque toujours...


  J'ai eu l'occasion ces derniers jours de me rattraper, grâce à la mise en vente simultanée (étonnante coïncidence) de plusieurs autres "prématurés" que je tiens à vous montrer. 

 Voici tout d'abord ce tiers inférieur d'une feuille que les trois capitaines auraient appelée vilaine :


  Regardez bien dans la marge du bas : la date du jeudi 26 mars est la toute première connue à ce jour pour ce timbre, une semaine avant sa sortie ! Cette feuille n'a pas satisfait aux exigences rigoureuses de qualité de l'atelier de fabrication des timbres-poste, et a été annulée à la main par ces hexagones concentriques, apposés à l'aide d'un rouleau encré de noir. On appelle ça une "paraoblitération".  
Son prix étant un peu trop élevé pour moi, compte-tenu de son mauvais état de conservation, je me suis contenté d'un fragment, déniché ailleurs, et caché dans un lot :

La toute première date d'impression de toutes les Semeuses !
Une semaine avant leur naissance officielle.

Qui pourra nous montrer une date encore plus prématurée ?


  Et comme le hasard fait toujours bien les choses, j'ai également mis la main au même moment sur cet autre bloc, daté du lendemain, le vendredi 27 mars :


  Cette date là aussi m'avait glissé entre les doigts par le passé, mais en moins jolie :


  Toutes ces feuilles annulées qui auraient dû être détruites, se sont faufilées entre les mailles du filet pour sortir de l'atelier et parvenir entre les mains de quelques philatélistes avertis. 

  Ce n'est pas moi qui vais m'en plaindre, même si elles ont été découpées. Heureusement pour moi, leur marge inférieure a été conservée !

Une seule date par feuille. Probablement quelques feuilles existantes, témoignant des difficultés techniques rencontrées.

N'allez pas croire en les voyant ici réunies qu'on en voit souvent : elles sont vraiment rares !

  Lorsque le tirage tourne à plein régime, l'atelier peut imprimer à l'époque jusqu'à 30 000 feuilles de 150 timbres par jour. De quoi satisfaire tous les français.

Peut-être existe t'il des feuilles non annulées aussi précoces ? 
Mais je n'en ai jamais vu...



mercredi 16 septembre 2020

Une correction s'impose !

 

  Contrairement à ce que j'affirmais en mars dernier au sujet de la Semeuse YT n°147 imprimée spécialement avec surtaxe pour la Croix Rouge, elle n'est pas la seule à pouvoir se rencontrer avec une impression tête-bêche !

  Une autre, quelques années auparavant, en 1906, avait également été imprimée avec la technique dite "en aile de moulin" : il s'agit de la Semeuse avec sol 10 c. rouge YT n°134. 

Vous pouvez voir un ancien article à ce sujet, en cliquant sur ce lien :

Semeuse avec sol

  Grâce au schéma montrant la feuille d'impression avec les 2 panneaux de 50 timbres, vous comprendrez aisément qu'il ne peut s'agir du timbre dit au type I. Les panneaux n'étant pas voisins.


  En revanche, la même technique avait été utilisée quelques jours plus tard pour l'impression du timbre dit au type II, ce qui avait été décrit par Pierre de Lizeray (Timbres et Types volume XIII), et que j'avais  un peu oublié...

Ce petit montage photo vous montre à quoi ressemblait une feuille de 300 de ce type II avec son impression en aile de moulin (toutes ont été découpées en 2 feuilles-vente de 150) :

Imaginez-la non dentelée car la séparation en deux intervenait après l'impression et le gommage, mais avant la perforation.


  Si, lors de manœuvre manuelle de retournement de la feuille pour la deuxième impression de 150 timbres, l'ouvrier ne plaçait pas tout à fait la feuille au bon endroit, avec un petit décalage latéral, voici ce que cela pouvait donner une fois les deux feuilles séparées :


L'une d'entre elles se retrouve avec une spectaculaire impression tête-bêche, certes partielle, sur son bord de feuille !

Et forcément, l'autre feuille de 150 dont une partie a été amputée lors de la découpe, n'est plus bonne qu'à partir à la poubelle...

La perforation, bien évidemment, n'était appliquée que sur la feuille qui pouvait être utilisée.


Tout comme ce fut le cas pour la Semeuse Croix Rouge.

En revanche, je n'ai jamais vu cette variété sur la Semeuse avec sol, seulement cette image en noir et blanc, mais peut-être qu'un jour...


samedi 12 septembre 2020

On en sait un peu plus...

 

  Je reviens sur la fameuse Lettre Touristique Mondiale que je vous avais présentée en mars 2019 :

LTM

J'avais lancé (sans succès) un appel à mes lecteurs, au cas où ils auraient la chance d'en croiser une.

Figurez-vous que c'est moi, en fouillant dans un célèbre site de vente, qui suis tombé sur cet exemplaire détaché et oblitéré qui m'avait échappé :


Il faut dire que le vendeur n'avait curieusement pas placé le mot "Semeuse" dans sa description... 

Pas de chance pour moi !

  Il semble toujours bien s'agir d'un type III, issu des roulettes rotatives, reconnaissable à ses dents verticales coupées mécaniquement, et oblitéré d'avril 1929. Ce qui fait déjà deux ans de connus pour leur utilisation, puisque le précédent était de 1927.

*****

  Et puis, j'ai profité des congés de cet été pour ranger un peu mieux mes archives papier. 

J'y ai retrouvé une ancienne correspondance d'un grand amateur de cette Semeuse lignée rouge à 50 centimes, dans laquelle il nous disait avoir croisé une de ces lettres, oblitérée et ayant circulé, mais affranchie avec un timbre non perforé ! 

Hélas, il est décédé depuis longtemps, et je ne peux vous la montrer. Qu'est-elle devenue ?...


   En revanche, il nous révélait celle-ci dont le timbre est bien perforé et qui a également circulé, mais qui est d'un troisième modèle inédit :


   Les messages et les images publicitaires sont bien différents des autres, mais concernent toujours la région de Valenciennes. Ville qui semble être aussi celle du cachet oblitérant.

Quant à l'année ? Mystère ! La qualité de l'image n'est pas assez bonne hélas, pour y voir le numéro de série.

*****

Au passage, pour les 2 autres précédemment montrées, je précise que :

- l'enveloppe avec au dos l'annonce pour VENOT & Cie  porte la mention "Série 801",

- alors que celle avec l'annonce pour la maison A Jeanne d'Arc est de la "Série 803".

*****

Plus on cherche, plus on trouve !...


mardi 4 août 2020

A la guerre comme à la guerre !


  Il est vrai que ce n'est pas une date dont on aime se souvenir, et vrai également que les rares survivants (s'il en reste) ont probablement de gros trous de mémoire à présent, mais tout de même !...

Je n'ai pas trop entendu parler dans les médias en ce début août de l'anniversaire de l'entrée en guerre de notre pays : 106 ans, c'est vrai qu'on pourrait l'oublier...

  La généralisation de la crise majeure qui a suivi en Europe puis dans le monde entier, a laissé des traces indélébiles dans l'histoire et dans l'esprit de tous les Français.

Lequel d'entre nous n'a pas perdu un ancêtre au cours de ces années de conflit, ou n'a pas entendu un de ses grand-parents raconter les difficultés de la vie qu'ils ont dû surmonter ?

La COVID, en comparaison, c'est de la roupie de sansonnet !

  Concernant l'économie de notre pays, j'imagine que les dirigeants de l'époque ont bien dû se creuser la cervelle, au moins autant que ceux de nos jours, pour trouver des solutions à la crise...

  En fouillant dans les archives familiales, dans les tiroirs des meubles les plus anciens, il est facile de tomber sur des tas de vieux papiers sans plus aucune valeur, mais que personne n'a jamais osé jeter.
Et parmi ces papiers : souvent de vieilles actions en bourse, des bons du trésor, des courriers ou des cartes postales, presque toujours affranchis avec les plus courantes de nos chères Semeuses.

Les belles trouvailles y sont rares, mais cela vaut le coup d'y jeter un œil, et les souvenirs qui les accompagnent sont toujours émouvants !

*****

  Je tenais aujourd'hui à vous montrer un document de 1918 qui réunit timbres et effort de guerre. Et qui n'est vraiment pas courant. Peut-être est il resté enfoui dans une commode depuis un siècle, qui sait ?

Voyons tout d'abord à quoi ressemblait un de ces fameux "bon du trésor" apparus au début le la guerre :


Pour que les citoyens adhèrent au principe des émissions de bons du trésor, appelé « bons de la défense nationale », il fallait leur offrir des conditions d’une grande simplicité, que tout le monde puisse comprendre. Les bons seront affranchis de tout formalisme quant à leur délivrance et leur remboursement. Les souscripteurs seront dispensés de se faire connaître, et pourront bénéficier des guichets des agents des finances, mais aussi ceux de tous les bureaux de poste. Le gouvernement organisera des campagnes de publicité qui en feront la promotion durant tout le conflit.

  C'est là que notre Semeuse entre en scène !

  Afin de permettre aux petits épargnants (ceux dont les moyens sont les plus modestes) de participer à l'effort de la nation, et ainsi profiter de quelques sous intérêts, des Cartes d'économies ont été émises en 1918 :


Au fur et à mesure, l'épargnant pouvait y coller à son rythme à lui, des timbres-poste pour un total maximum de 5 francs.


Celle-ci n'a visiblement pas pu être complétée par son propriétaire 
qui s'est arrêté au bout d'un franc cinquante.

  Sinon, le but était de l'échanger une fois complète, et dans un bureau de poste, contre un bon de la défense qui vaudrait 5 francs vingt-cinq ! Bénéfice net : la valeur d'une Semeuse à 25 centimes, soit juste de quoi affranchir une lettre pour l'étranger !
Pas de quoi rêver, mais c'est toujours ça...

  D'ailleurs, j'en avais vu passer une autre de ces cartes dans une vente publique il y a longtemps, qui serait la seule connue complète et oblitérée :


Cette fois-ci, le compte est bon : 5 francs tout rond !

Elle a bien été délivrée le 19 septembre 1919 au bureau de poste parisien de la rue Le Pelletier, à un certain Mr Nordemann, qui a ensuite économisé pendant 17 mois en y collant petit à petit ces 27 timbres. Mais ceux-ci n'ont été annulés que bien plus tard, le 15 février 1921, par le cachet des P&T de la Seine, lorsqu'il s'est représenté au guichet pour l'échanger contre un bon semblable à celui figurant ci-dessus. 

   Bref, il faut croire que ces cartes n'ont pas eu beaucoup de succès, probablement en raison de l'inflation galopante qui rendait un peu ridicules les 5% d'intérêts promis, alors qu'ils nous feraient pourtant rêver aujourd'hui !

 Elles faisaient encore parler d'elles bien après la fin de la guerre, dans le Journal Officiel du 23 mars 1920 :



*****

    Ces cartes sont à rapprocher des Bulletins d'épargne, plus courants et mieux connus, mais basés sur le même principe d'utiliser des timbres pour économiser. 


Et c'est encore notre Semeuse qui s'y collait !


Eux aussi sont rares avec leurs timbres oblitérés, 
souvent annulés à l'aide d'une griffe répétitive
 "SEINE / SEINE / SEINE / SEINE "
car eux non plus n'étaient pas des documents destinés à être conservés, 
ni détenus par le public après leur utilisation.